Méthodes et ateliers produit au coeur du hub de transformation de BNP Paribas

Product Management
Peter Wullaert / Sophie Sauvaget
Peter Wullaert / Sophie Sauvaget
27.6.24

Comment amener ses clients à passer d’une culture projet à une culture produit ?

C'est le sujet que nous avons abordé avec Pierre Potron, directeur des opérations du BivwAk!, hub de transformation de BNP Paribas

Dans la première partie de l’interview Pierre a parlé du passage d’une culture projet à une culture produit, des phases de cadrage et de discovery.

Ici nous allons aborder les méthodes et la mise en place des ateliers (delegation poker, rôles et responsabilités) ainsi que du produit My impact.

Pour l'écouter, c'est ici : https://smartlink.ausha.co/pause-produit/la-pause-produit-pierre-potron-bivwak

L’atelier d’alignement

PETER : Tu disais que le projet est confié à une équipe qui est autonome: Comment c'est pris vis-à-vis du porteur de projet, son niveau d'implication, son niveau de décision ? Parce qu'il y a aussi je pense un changement de mindset par rapport à ça. Comment ça se passe ?

PIERRE : L'idée c'est de convaincre au départ. Convaincre d’y aller en fait tout simplement. De se dire : Par rapport à des modèles où je suis sponsor, plutôt en décisionnaire ultime sur certaines problématiques, comment je vais me laisser tenter par cette nouvelle approche ?

En même temps on a face à nous des gens intelligents qui vivent dans le même monde que nous, qui ont des enfants qui utilisent des applications.

Enfin ils voient bien qu'aujourd'hui les start-up influencent beaucoup la manière dont on travaille aujourd'hui la culture produit. Ils ont aussi envie de tester ce modèle-là.

Quelque part on vient leur permettre ce premier test là.  Donc il y a besoin de réassurance, d'explication. Parce que ces gens qui sont pour la plupart très analytiques ont besoin aussi d'expliquer façon avantage / inconvénient.

Je schématise, mais c'est de la discussion, de la conviction. Et puis à un moment donné, une fois qu'on a bien expliqué le cadre, ça marche.

Ils sont d'accord.  Ils laissent leur chance au produit, à l'incubation, à l'accélération, pour avancer ensemble.

PETER : Est-ce que du coup ce rôle et cette responsabilité font partie des éléments prédominants, des clés de la réussite ?

PIERRE : On a souvent des ateliers d'alignement au départ sur comment finalement ça va se passer. Ensuite effectivement on a des ateliers qui permettent de définir les rôles et les responsabilités de chacun.

C'est assez intéressant cet atelier : On a chaque membre de l'équipe, et même plus largement, en fonction de la population qu'on a envie de faire travailler autour de cet atelier là.

Il y a une grille avec le nom de chacun et puis le rôle. Puis on va pouvoir décrire dans la case en question, moi par rapport à telle personne, par rapport à mon rôle et son rôle, j'ai la responsabilité de faire ça et j'attends ça de cette personne.

Chacun le fait tout seul et ensuite on partage.

On se met sur un grand mur. On trace la grille et on complète avec les réponses. Et là, magie, il y a des trous dans la raquette.

Ou alors il y a même des responsabilités qui ne sont pas positionnées sur le même rôle ( parce que le point de vue de chacun finalement est divergent).

A ce moment-là on va pouvoir voir ce qui marche (et tant mieux !). Mais là où il y a des trous ou là où il y a des doublons, on va travailler collectivement : C'est toi? c'est moi ? Comment ça se passe ? On réajuste.

Là on a une big picture de comment ça se passait. Cet atelier là on le joue en général pendant l'unboarding sprint.

C'est le design sprint mais qu'on a appelé “unboarding sprint”.

On le rejoue si nécessaire quelques mois plus tard si jamais il y a eu des mouvements dans l'équipe (ça peut arriver). Ou si on voit qu'il y a certaines divergences.

PETER : Qui participe à cet atelier ?

PIERRE: Alors en général on fait participer la squad, le corps plus initial.

On a un rôle qui s'appelle les advisors : ce sont les personnes qui sont mises à disposition de la squad mais de façon ponctuelle en fonction de certaines problématiques.

Je pense à des équipes qui sont plutôt régaliennes (type legal, compliance, risk, cyber security). Ces gens qui viennent donner des conseils, des advisors. On peut aussi élargir ce cercle là.

Cet atelier est animé par des coachs agiles chez nous.

Donc le scrum ou la scrum participe au même titre car il.elle fait partie de la squad.

L’idée c’est que c'est un tiers de confiance qui vient animer ce type d'atelier.

Delegation poker,  « Rôles et responsabilités », et autres ateliers

PETER : On a parlé de la responsabilité, des rôles et des délégations, je vais arriver aux delegation poker. Est-ce que ça aussi ça fait partie des ateliers que vous pratiquez, pour que l'équipe puisse être autonome et connaisse au-delà des responsabilités ce jusqu'où elle peut aller ?

PIERRE : Oui c'est un atelier qu'on peut aussi animer. Mais on ne va pas calquer une série d'ateliers d'une squad à l'autre. Selon la problématique on va utiliser ce catalogue d'outils issu du management de 3.0, du monde de l'agilité en général etc. ou du coaching (pas que agile mais professionnel).

On va piocher dans ces différents catalogues des formats d'atelier.  On va les adapter en fonction de la problématique. Donc le delegation poker en fait partie, comme l'atelier qu’on a appelé « Rôles et responsabilités ».

Il y en a d'autres aussi qui permettent de pouvoir fixer les choses et venir débloquer des situations, ou plutôt améliorer le fonctionnement d'une équipe puisque parfois ça roule.

Mais on peut aller encore plus loin**,** ça peut être encore plus fluide. Donc n'hésitons pas à prendre ce temps pour le faire.

Ça me fait penser à la phase de cadrage. Souvent aux sponsors qui ont toujours des plannings blindés etc. , je leur propose des ateliers de 2-3 heures pour venir tacler des trucs ou s’aligner avec l'équipe.

Si c'est important pour toi, tu dois investir ce temps. C'est un investissement.

Les différents titres d'atelier qu'on vient de mentionner, quand c'est vraiment important pour l'équipe, il faut savoir investir ce temps-là.

Il y a un ROI qui n’est pas palpable mais qui est ultra nécessaire. Parce que derrière on va vers une équipe fluide, des gens qui s'entendent, un produit qui fite avec son marché, qui est attendu par le client, qui va résoudre de vraies problématiques. C'est ça l'enjeu de ce type d'accompagnement.

PETER : Comment tu arrives à aller chercher de la valeur et plus de la livraison sur cette phase de delivery ? Parce qu'il y a le cadrage, on implique les rôles responsabilités.

Maintenant, ton sponsor ou client va avoir cette notion de livrable temps/heure: Comment tu arrives justement à amener de la valeur qui va avoir une répercussion client ?

PIERRE : Sur la valeur, tout se mesure quelque part, il faut tester. La valeur est inhérente au produit que tu veux lancer et elle est liée aussi au modèle opérationnel que tu vas mettre en place pour gérer le produit.

Donc la création de valeur est assez essentielle et elle est même centrale.

C'est-à-dire qu' avec les méthodes scrum, on a le temps qui ne bouge pas, la date de livraison ne bouge pas, on a le budget qui ne bouge pas, enfin les ressources, les moyens. La seule chose sur laquelle on va travailler, c'est le scope fonctionnel.

Il y a un moment donné, tu es drivé par la valeur.  Tu n’es plus drivé par :  « Je veux 100 fonctionnalités, donc je m'attends à en avoir 100. » Non en fait. La vie c'est pas rose. Ce n'est pas linéaire. Et donc à un moment donné, il va bien falloir fixer une business value à chaque user-stories pour pouvoir  en faire un filtre et se dire, ok, on va se concentrer là-dessus parce que ça, c'est attendu.

Donc on revient aux mesures, aux tests, qui vont permettre de justifier de la valeur d'une US et si on ne sait pas, on va aller chercher.

Le produit My impact

PETER : Aujourd'hui dans le scope, le périmètre de personnes, est-ce qu’il y a des choses qui ont fonctionné ou qui n'ont pas fonctionné ?

PIERRE : Alors je vais commencer par ce qui a fonctionné.

On a monté un produit au tout début de notre aventure qui s'appelle My Impact

C'est pour la banque privée. L'idée est assez simple, mais en vrai c'est très puissant.

Maintenant c'est déployé à l'international. C'est un produit qui est utilisé par la banque privée à destination des gens fortunés, pour la gestion de fortune.

Les conseillers utilisent cet outil-là (qui est un peu pour moi le test Marie Claire).

C'est un formulaire que tu remplis. Sauf que derrière il y a un petit algorithme qui est bien pensé et qui permet de personnaliser les questions et d'arriver sur un profil.

L'idée c'est que ce profil là te donne tes appétences par rapport aux différents objectifs de développement durable de l'ONU, les SDGs.

Tu vas remplir le formulaire. Tu réponds aux questions. A la fin on te dis si tu es plutôt appétant à finalement à l'accès à l'eau, à la protection de la forêt ou à l’alphabétisation. J'en cite trois parmi les quelques-uns qui existent.

L'idée c'est qu'une fois que tu as ton profil, le banquier privé en face de toi va t'aider à réorienter tes investissements, tes placements sur des supports financiers qui vont être plutôt à destination des objectifs qui te parlent.

C’est assez puissant : ça permet de réorienter plusieurs centaines de millions d'euros de placements sur des entreprises, sur des obligations d'État, des choses un peu plus proches de leur sensibilité.

Et moi je trouve ça assez rigolo. Pour moi c'était plutôt le test Marie Claire au départ et je me demandais : Qu'est-ce qu'on va faire de ce truc ?

Effectivement c'est assez puissant même si ce n’était pas hyper complexe à mettre en œuvre. C'est ça qui est marrant : Finalement ce ne sont pas les choses les plus complexes qui peuvent avoir le plus d'impact. Parfois il y a des choses très simples à mettre en œuvre qui permettent d'avoir beaucoup d'impact.

PETER : Entre ce qui était demandé (le cahier des charges) et ce qui a été finalement livré, qu'est-ce qui a changé ? Est-ce qu’il y a eu un changement et d'avoir cette approche produit client fait qu'on n'était pas juste sur un test « Marie Claire » et qu'on arrivait à quelque chose de bien plus important où on a été chercher la valeur de cet impact-là ?

PIERRE : Typiquement là-dessus, on a fait appel à des clients qu'on a interviewés.

Il y a le protocole de tests pour pouvoir mesurer un peu le retour.

On voulait le donner en mode usage autonome (que la personne fasse elle-même son test à la maison, etc.). Et on s'est vite rendu compte qu'il fallait mettre du contexte.

C'est aujourd'hui un outil qui est déployé sur tablette dans les mains du conseiller, mais avec le client en relation de proximité. C'est un truc qu'on n'avait pas détecté au démarrage.

Ensuite, la manière de poser les questions, l'intégration aussi avec le système, ce n’est pas simple. Donc il y a des choses qui ont été modifiées avec les interviews des clients,mais aussi l'interview des conseillers bancaires pour permettre d'adapter le produit, qu’il soit le plus fluide possible, le plus parlant.

On s'est fait assister par des universitaires notamment pour valider les méthodes de calcul. Mais aussi pour les résultats, pour pouvoir bien les exprimer et faire en sorte que ça soit solide. On a une caution de chercheurs sur la manière de faire.

PETER : Donc ça vous a permis d'aller plus loin que simplement ce test ?

PIERRE : Oui, complètement.

Après il y a d'autres sujets qui n'ont pas fonctionné…

La partie 2 de l’interview s’arrête ici, la deuxième arrive très vite !

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